Premières avancées

• Tension entre représentation et pratique

Nous avons observé une tension entre l’imaginaire du souterrain et l’usage effectif de ce lieu. Dans le cas de notre terrain, les personnes imaginent par exemple : un métier trépidant en tant que militaire dans le souterrain alors que la plupart du temps, les employés s’ennuyaient et faisaient des courses dans les escaliers avec les secrétaires. Aussi, la majorité des personnes interrogées pensent que les souterrains abritent un espace d’écoute ( mythe) et non un espace de transmission ( pratique).

• Segmentation spatiale : vie en-dessous et vie au-dessus

Les récits relatent une segmentation spatiale entre ce qui se passe à la surface (vie visible, de la Citadelle) et ce qui se déroule sous terre (espaces cachés, vie souterraine). Cette segmentation génère un jeu de regards où les différents espaces se croisent sans réellement se voir, il y a alors une tension entre monde visible et invisible. Cela soulève aussi des questions de séparation spatiale entre différents univers sociaux qui coexistent dans un même lieu.

• Espace de socialisation : souterrain et déviance

Le souterrain devient un lieu de socialisation alternative, souvent associé à des pratiques déviantes ou marginales (notion développée par l’anthropologue Gayle Rubin). Cela inclut des pratiques festives comme les raves dans les catacombes, qui représentent un espace de réappropriation de l’ordre public par des groupes souvent perçus comme en dehors de la norme. Ces espaces échappent temporairement au contrôle officiel. Il peut cependant exister un ordre interne à ce groupe considéré comme marginal. La tension entre ordre et désordre peut donc se situer à l’intérieur du même groupe social.

• Ordre et désordre

La question de l’ordre (représentée ici par les militaires ou le régime) et du désordre (les raveurs, ou les résistants) induit une dualité persistante. Dans le cas des souterrains, il serait intéressant d’interroger cette binarité. Dans l’ordre, nous avons aussi du désordre (avec des activités liées aux désordre dans les souterrains) et à l’inverse, dans le désordre (l’organisation des raves) il peut y avoir aussi des formes de hiérarchie.

• Réappropriation de l’espace : multiplicité des usages

Cette (ré)appropriation des espaces, qu’ils soient militaires ou festifs, s’articule aussi autour d’un jeu d’échelles temporelles : les espaces des souterrains sont chargés d’histoire

(stockage d’armement, centre de transmissions) et sont redéfinis par des événements ponctuels récents (les raves partys organisées). Nous nous concentrons de la période allant de la seconde guerre mondiale à nos jours.

• Réappropriation de l’espace : comment faire la médiation d’un espace ou l’on ne peut pas aller ?

L’enjeu principal de notre enquête et future médiation est d’évoquer un lieu auquel le public n’a pas accès. Chaque espace est caractérisé par un ressenti spatial particulier, pour les souterrains nous imaginons une sensation de profondeur, dans l’obscurité, une ambiance sonore. Comment transmettre ces sensations aux public lors de la balade patrimoniale? Comment faire imaginer ces lieux que nous découvrirons prochainement ?

Aussi, nous avons remarqué que la plupart des contacts qui nous ont été transmis sont masculins et issus du domaine de l’armée et non des raveurs- raveuses. Nous nous interrogeons alors sur une méthode de récolte de récits qui puisse toucher des personnes autre que des hommes dans l’armée, ainsi que des témoignages plus contemporains.